l'union européenne et la finance sont les ennemis cupides, perfides et impitoyables de ses populations surexploitées...



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> la France bientôt en panne, qui veut encore faire tourner la boutique ?

Rédigé par webmestregg Aucun commentaire
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          Il paraît que les Français ont la flemme, qu’une foultitude d’emplois est non pourvue. C’est d’ailleurs pour cette raison que les génies de l’économie qui nous dirigent (à coups de pied au cul et à la schlague) viennent de faire passer cette énième contre-réforme de l’assurance-chômage qui va mettre sur le carreau, un peu plus vite, des demandeurs d’emploi que la précédente contre-réforme avait déjà bien assommés.

          Laissez-moi vous raconter une histoire, en l’occurrence la mienne. Non pas qu’elle soit exaltante (pour l’exaltation, mieux vaut se plonger dans un roman d’aventures que dans le roman de ma pauvre vie), mais simplement parce qu’elle est significative de ce que nous sommes des millions, femmes et hommes, à vivre depuis trop longtemps.

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          J’ai 47 ans. Je suis sans emploi (mais pas sans travail) depuis presque deux ans. À la suite d’un différend avec mon employeur, nous nous sommes séparés d’un commun accord. En vérité, j’étais au bout du rouleau. Soit, je partais, soit j’optais pour une solution plus radicale et sans retour. J’ai choisi le départ. J’en ai profité pour créer une microentreprise. Après vingt-cinq ans ou presque de bons et dociles services dans le monde merveilleux du salariat, je me suis dit que c’était maintenant ou jamais. Quand j’ai du boulot, je m’éclate. Sans doute parce que ce travail je l’ai choisi et qu’il échappe aux hiérarchies, aux réorganisations incessantes, aux procédures à la con, aux demandes de reporting et à tout ce qui rend la vie en entreprise insupportable.

          Malheureusement, cette activité est incertaine et peu rémunératrice. Quand je me sors un salaire mensuel de 600 €, je fais sauter la bouteille de limonade pour fêter ça ! Actuellement, sans l’allocation-chômage qui vient compléter les revenus de mon autoentreprise et mon conjoint (et je déteste l’idée de dépendre d’un homme) je ferais les poubelles pour me nourrir ou j’irais allonger la liste des bénéficiaires des restos du cœur. Mais je sais que cette allocation n’est pas éternelle (elle le sera d’autant moins à partir de 2023 avec cette nouvelle saloperie qui vient d’être adoptée par le Parlement). Aussi, tout en exerçant en qualité d’autoentrepreneuse, je continue à chercher un emploi salarié. Mais en dix-huit mois, et après plus d’une centaine de candidatures, je n’ai pu décrocher qu’un seul entretien d’embauche qui n’a pas abouti. J’accumule les réponses négatives, quand les employeurs daignent seulement répondre ! Je postule pourtant sur des emplois où ma candidature est parfaitement en phase avec les compétences et l’expérience exigées, y compris des emplois pour lesquels je suis surqualifiée. Mais rien. Il ne se passe rien. Pas de retour. Absolument RIEN ! Je ne regarde même plus les rémunérations proposées. De toute façon, la grande majorité d’entre elles ne proposent pas autre chose que le SMIC. Et quand je regarde le nombre de candidatures en cours (option proposée par le site de Pôle emploi pour chaque offre à laquelle vous postulez), je me mets à avoir des sueurs froides. Parfois, ce nombre monte jusqu’à 55 ! Un poste, 55 postulants. Bref, c’est la guerre !

          Vous voulez que je vous dise pourquoi après plus de cent candidatures, j’en suis toujours au même point ? Simplement parce que j’ai 47 ans. Pour le marché de l’emploi, je suis déjà bonne à ranger au rayon des antiquités ! Macron, Lemaire and Co veulent me faire bosser jusqu’à 65 balais, mais sur le marché, je ne vaux déjà plus un clou. Parce que dans ce pays, les entreprises vous considèrent comme un produit employable entre 28 (avant, vous êtes trop jeune) et 40-42 ans grand max. Vous êtes employable pendant une petite quinzaine d’années, mais il faut trimer 42, demain 45 ans, pour espérer toucher une hypothétique retraite qui sera, à n’en plus douter, de misère.

          Contre-réforme de l’assurance-chômage, contre-réforme du système des retraites (à venir), emplois sous-payés, inflation à deux chiffres, conditions de travail déplorables, perte de sens, sans même parler de la crise climatique et de ses conséquences, et il faudrait en plus se montrer motivé, enthousiaste et volontaire ? En somme aller à l’abattoir, le sourire aux lèvres et en chantonnant pendant que là-haut, ça se vautre dans le luxe et le superflu ? Mais de qui se moque-t-on ?! On peut de moins en moins se loger (les prix de l’immobilier sont devenus inaccessibles pour des pans entiers de la population), de moins en moins se chauffer, se nourrir coûte un bras (se nourrir sainement, on n’y pense même plus). Les perspectives sont nulles. L’avenir est une impasse.

          Je n’ai pas la flemme. Je suis simplement écœurée et profondément lasse de cette vie de merde et d’un futur qu’on me promet pire encore. Je n’ai plus envie de participer, plus envie de faire tourner la boutique France. À quoi bon ? Déjà en 2019, quand j’arpentais les manifs contre la retraite à points, je me disais (et je vous disais) que si cette saloperie passait, je rendrais mon tablier (à l’époque, j’avais encore un job). Aujourd’hui, plus que jamais, j’ai envie de déposer là mon tablier, de tout arrêter séance tenante. De toute façon, je n’ai pas grand effort à faire puisque la société me signifie qu’elle n’a plus besoin de moi, que je suis mûre pour la déchetterie. Je suis d’ailleurs tellement passée dans le camp des « inutiles » qu’en février prochain, je ne toucherai plus aucune allocation. Vous me direz, il faut bien que ça s’arrête un jour. On ne peut pas ad vitam aeternam financer des demandeurs d’emploi sans emploi. Pourtant, on finance bien, et cela depuis des décennies, des entreprises et notamment des grands groupes, à coups de cadeaux fiscaux en tout genre et de subventions diverses et variées, et ça ne choque visiblement pas grand monde.

          Ce qui me fait tenir et m’empêche tout geste désespéré contre moi-même ? La colère, de plus en épisodique, il est vrai. Avant, elle était mon premier carburant. Elle est devenue plus sourde, plus calme, mais elle continue à me tenir debout. Comme l’idée que je peux, peut-être, faire encore un peu chier ce pouvoir sadique par des actions individuelles et collectives. Et puis ma disparition, ce serait finalement la victoire de ceux qui nous maltraitent. Car soyons lucides jusqu’au bout. Ma vie ne compte pas. Pour reprendre, en la détournant, une formule connue, « ma vie ne vaut rien à côté de leurs profits ». Que je sois morte ou vive, peu importe. Il est même probable que morte je serais plus utile au système économique et financier qui vampirise la société. Il me reste encore trop d’amour-propre, voire d’orgueil, pour leur donner ce point-là. Alors qu’ils aillent au diable ! Je choisis la désertion, la marge, le retrait, le refus, l’inertie, la force de l’inertie. Je rends mon tablier. Et comme disait Coluche dans un sketch aussi célèbre qu’actuel (40 ans plus tard) : la société n’a pas voulu de moi, qu’elle se rassure, je ne veux plus d’elle !

          Le paradoxe de toute cette histoire, c’est que plus la date fatidique de la fin de droits approche et plus je me sens sereine. Il y a six ou huit mois, cette perspective m’empêchait de dormir la nuit et me filait des aigreurs d’estomac le jour. Aujourd’hui, je m’en fous. À partir de février 2023, je ne devrai plus rien à l’État, je ne craindrai plus, non plus, le risque de contrôle administratif pour vérifier que je suis un bon chômeur qui cherche activement un emploi qui n’existe pas ou qu’on me refuse parce que je n’aurais pas l’âge adéquat. Je n’aurai plus rien à perdre puisqu’il n’y aura plus rien à me prendre.

          Mais les strates les plus aisées de la population devraient se méfier, car le jour où la part de ceux qui n’ont plus rien à perdre aura atteint un seuil critique, il n’est pas certain que leur petite vie tranquille n’en soit pas affectée. On ne fera pas tourner la société avec les 20 % de catégories supérieures qui bossent dans des tours dans les métropoles, sur des écrans, remplissent des tableaux Excel à la Défense ou télétravaillent depuis leur résidence secondaire en Bretagne. La grande panne généralisée n’est peut-être pas si loin, et ce dont je suis certaine, c’est que ce ne sont pas ceux qui ont déjà tout perdu qui en souffriront le plus. - source -

Bravo et merci Mme Eva pour cette grande page de vérités sur la vie des populations européennes perdues et celles de la France en particulier !